Droits de douane à 15%: soulagement des milieux économiques

L’étau se desserre un peu pour l’industrie des machines et l’horlogerie. Mais le franc fort et la conjoncture défavorable demeurent.

En bref:

  • La baisse des droits de douane à 15% soulage l’économie de l’arc jurassien.
  • Neuchâtel, dépendant à 98% des exportations, accueille favorablement cette annonce.
  • Felco peut rétablir sa compétitivité face aux concurrents européens et asiatiques.

«La baisse des droits de douane à 15% est un soulagement, car un franc sur deux du secteur secondaire est dépendant des exportations, notamment aux États-Unis, qui constituent la moitié des exportations de certaines des entreprises de notre région», déclare Nicolas Curty, président de la Chambre d’économie publique Grand Chasseral (CEP).

Neuchâtel fait partie des cantons fortement dépendants des exportations, 98% du PIB pour ce dernier. «Le Conseil d’État accueille positivement l’annonce d’une baisse du taux des droits de douane, qui impactent durement le tissu industriel neuchâtelois.»

Neuchâtel dépendant des exportations

Il y a trois semaines, le Canton présentait un plan d’action aux entreprises impactées par ces taxes. «Il conviendra donc de redimensionner l’action prévue si la situation devait visiblement s’améliorer à la suite de cette annonce», déclare la conseillère d’État Florence Nater, chargée du Département de l’économie et de la cohésion sociale.

Toutefois, rappelle-t-elle, «pour de nombreux exportateurs, la force du franc est plus grave que les droits de douane, car elle touche l’ensemble des exportations. Les aides (ndlr: du plan d’action) sont liées à des projets d’innovation et de diversification et restent parfaitement d’actualité en raison des éléments d’incertitude mentionnés.»

Chez Felco, basée aux Geneveys-sur-Coffrane (NE), la nouvelle est tombée au moment même où se discutait le budget 2026. «Nous partions sur le pire scénario, comme c’est l’usage, et le ballon d’oxygène est très apprécié», lâche le CEO Nabil Francis. Le fabricant de sécateurs et d’outils de jardinage exporte 25% de ses produits aux États-Unis. «On voit le verre à moitié plein, car 15% sont préférables à 39%, mais cela reste beaucoup plus qu’en début d’année. Le point important est que nous pourrons rétablir notre compétitivité par rapport à nos concurrents européens et asiatiques.»

Bulgari attentiste

CEO de Bulgari, Jean-Christophe Babin accueille positivement la nouvelle, car «il était impossible d’augmenter les prix uniquement pour les clients américains, sous peine de créer un chaos». Il reste cependant prudent: «Il faudra voir quelles sont les modalités précises de cet accord, et surtout quelle est sa pérennité.» La marque est déjà soumise au tarif de 15% pour la partie joaillerie, produite en Italie. «Mais pour ce secteur, comme pour les montres en or, ce qui préoccupe est précisément le prix de l’or, qui a doublé.»

Fluctuation de la demande

«C’est une bonne nouvelle pour l’industrie MEM, déclare pour sa part Nicola Tettamanti, président de Swissmechanic. Pour la première fois, nous bénéficions à nouveau des mêmes conditions-cadres que nos concurrents européens sur le marché américain.» La situation générale reste toutefois difficile: «Les entreprises restent sous pression, notamment en raison de la fluctuation de la demande, des coûts énergétiques élevés et d’un climat d’investissements tendu à l’échelle mondiale.»

Pour sa part, Arthur Jurus, directeur des investissements de la banque ODDO BHF Suisse, estime que «cette détente pourrait atténuer la contraction des carnets de commandes anticipée pour la fin de 2025 et réduire la pression sur les marges export, déjà fragilisées par le franc fort.» Et d’ajouter: «Même si seulement 4% des exportations suisses étaient sensibles aux nouveaux tarifs, l’impact sur la croissance économique en 2026 pourrait être de 0,2 point, soit un taux de croissance de 1,6% pour 2026.»

Coup de semonce

Le coup de semonce ne doit pas être oublié, relève encore Nicolas Curty. «Depuis quelque mois, nous avons vu que notre diplomatie économique n’était plus alignée sur la nouvelle réalité du monde qui nous entoure. Les États-Unis, mais aussi la Chine, l’Union européenne, jouent la carte de l’interventionnisme et du protectionnisme, un état de fait qui va perdurer. Nos autorités n’avaient pas pris la mesure de ces changements de paradigme, et la Suisse s’est crue plus belle qu’elle n’est. À nous tous d’en tirer les leçons.»

source : https://www.24heures.ch/droits-de-douane-a-15-le-soulagement-des-milieux-economiques-776207174256
auteur : Ivan Radja
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