Réindustrialiser sans mobilités ?

« Au travail, on s’y rend autrement »

C’est le slogan mis en avant par l’ADEME (Agence de la Transition écologique) pour promouvoir le challenge de la mobilité en Bourgogne Franche-Comté. Cette promotion, soutenue par le Conseil régional de Bourgogne Franche-Comté, au demeurant utile dans les zones urbaines ou péri-urbaines, peut-elle correspondre à des personnes résidant dans les villages isolés et travaillant à 20, 25 ou 30 kilomètres ?
La voiture demeure le seul moyen de transport fiable pour les liaisons domicile-travail au quotidien. Si le covoiturage est une solution alternative, il reste que les horaires de travail doivent être compatibles entre les différents passagers d’une voiture !

44 000 frontaliers francs-comtois traversent la frontière chaque jour pour travailler en Suisse

Le nombre de frontaliers a augmenté de 10% en un an, soit 3836 travailleurs en plus (source Pôle Emploi et Insee). Plus de 7 frontaliers sur 10 résident dans le Doubs, 2 sur 10 dans le Jura et 10% dans le Territoire de Belfort.
90% des frontaliers travaillent dans 3 cantons suisses : celui de Vaud concentre 39% des frontaliers, 32% dans le canton de Neuchâtel et 19% dans celui du Jura.

Aucune offre ferroviaire satisfaisante

Pour l’association des usagers des transports de l’Aire urbaine, il s’agit d’accélérer le cadencement et l’adaptation des horaires aux besoins des scolaires et frontaliers. « Sans un cadencement rapproché, l’exploitation d’un réseau de transport en commun est voué à l’échec ». L’association n’entend rien révolutionner. Les solutions sont de bon sens… ! Mais le bon sens ne fait pas bon ménage avec la technocratie.

La ligne des Horlogers…bienvenue au royaume d’Absurdie !

La Région a dépensé 50 millions d’euros pour réhabiliter cette ligne essentielle qui relie…en théorie…Besançon à La Chaux-de-Fonds. Mais la liaison côté français Morteau-Col des Roches est loin d’être terminée et le cadencement permet à un travailleur frontalier habitant à Besançon d’arriver à son travail…à l’heure de l’apéritif !
Environ 11000 frontaliers travaillent dans le canton de Neuchâtel (essentiellement entre Le Locle et La Chaux-de-Fonds). Ce sont donc potentiellement des milliers de voyageurs/jour qui pourraient prendre le train. Là encore, des études récentes ont démontré la pertinence d’un cadencement allant jusqu’à 12 A/R par jour, soit un train toutes les heures, voire toutes les ½ heures aux heures de pointe.

Embouteillages

Conseil régional et SNCF réseau répondent en chœur « il n’y a pas de voyageurs » ! Sans offre adaptée, il ne peut pas y avoir de demande…compliqué à comprendre. Cela fait plus de 20 ans que le problème se pose, cela fait plus de 20 ans que les suisses ont aménagé leur réseau, cela fait plus de 20 ans que les frontaliers (qui participent à la richesse de la Franche-Comté) doivent passer des heures dans les embouteillages. Dans le même temps, la collectivité régionale et l’État prônent l’utilisation des transports en commun « pour sauver la planète ».

Une étude de 2016 a proposé un système de navette entre Morteau et La Chaux-de-Fonds à raison de 18 A/R à condition d’une infrastructure en état entre Morteau et le Col des Roches. L’étude, pourtant très documentée, ne trouve aucun écho du côté de Michel Neugnot, vice-président chargé des transports à la région BFC.

La ligne des Hirondelles ne s’est pas envolée…

Le problème est surtout lié au manque de volonté politique des collectivités locales traversées et du manque d’ambition du Conseil Régional. Elle reste une ligne pas ou si peu empruntée à part dans les liaisons domicile-école…pas de quoi en faire un pataquès pour Michel Neugnot.
Et on ne parle pas de la difficulté des correspondances avec la ligne TGV en gare de Dole. Enfin, que dire de la grande oubliée des liaisons Strasbourg-Lyon qui irriguent toute la plaine du Jura…jusqu’à quand !

 

Patrick Réal, vice-président de la FNAUT BFC (Fédération Nationale des Associations d’Usagers des Transports), a en charge les relations France Suisse. L’ancien cadre de la SNCF n’est pas un ayatollah du ferroviaire. Il constate simplement que le potentiel existe sur ces axes qui traversent la Franche-Comté d’est en ouest et du nord au sud, des axes qui permettraient un développement démographique et surtout un essor économique, en partenariat avec la Suisse…
A suivre.

 

source : https://hebdo39.net/reindustrialiser-sans-mobilites/